Le
Parisien, l'édito de Henri VERNET- 03/10/2018
De
la tragicomédie gouvernementale, on risque de ne retenir de
l’épisode du jour que l’image de la passation de pouvoir
glaciale Place Beauvau ce mercredi matin. D’un côté, un Gérard
Collomb la tête déjà ailleurs, pointant sa montre, pressé de
faire l’école buissonnière. De l’autre, un Édouard Philippe en
pompier de service, tout de colère rentrée, saluant la « grande
culture » du sortant, hommage acide à cette « hubris » dont le
latiniste Collomb accusa naguère Macron d’être atteint. Or le
plus important est ailleurs. Il est dans les propos, graves et
alarmants, du désormais ex-ministre de l’Intérieur. « La
situation est très dégradée », assène-t-il à propos des
quartiers sensibles. « C’est la loi du plus fort qui s’impose -
des narcotrafiquants, des islamistes radicaux - qui a pris la place
de la République ». Et de livrer cette sombre prophétie : «
Aujourd’hui, on vit côte à côte… Je crains que demain, on vive
face à face ». Difficile d’être plus éloquent sur la tâche
immense et urgente de reconquête républicaine à laquelle doit
s’atteler le gouvernement. Las, le ministre abandonne le navire au
moment de lancer ce chantier. Rarement un pouvoir aura réussi à
autant brouiller son message. Loin d’une simple « péripétie » -
comme se rassure le président -, ceci est bien une crise.
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